En 1981, Roland Magadane...
Petits bouts de rien, fragments du tout
photo personnelle
Que la vie en vaut la peine...
C'est une chose étrange à la fin que le monde
Un jour je m'en irai sans en avoir tout dit
Ces moments de bonheur ces midis d'incendie
La nuit immense et noire aux déchirures blondes
Rien n'est si précieux peut-être qu'on le croit
D'autres viennent : ils ont le cœur que j'ai moi-même
Ils savent toucher l'herbe et dire je vous aime
Et rêver dans le soir où s'éteignent des voix
D'autres qui referont comme moi le voyage
D'autres qui souriront d'un enfant rencontré
Qui se retourneront pour leur nom murmuré
D'autres qui lèveront les yeux vers les nuages
Il y aura toujours un couple frémissant
Pour qui ce matin-là sera l'aube première
Il y aura toujours l'eau le vent la lumière
Rien ne passe après tout si ce n'est le passant
C'est une chose au fond que je ne puis comprendre
Cette peur de mourir que les gens ont en eux
Comme si ce n'était pas assez merveilleux
Que le ciel un moment nous ait paru si tendre
Oui je sais cela peut sembler court un moment
Nous sommes ainsi faits que la joie et la peine
Fuient comme un vin menteur de la coupe trop pleine
Et la mer à nos soifs n'est qu'un commencement
Mais pourtant malgré tout malgré les temps farouches
Le sac lourd à l'échiné et le cœur dévasté
Cet impossible choix d'être et d'avoir été
Et la douleur qui laisse une ride à la bouche
Malgré la guerre et l'injustice et l'insomnie
Où l'on porte rongeant votre cœur ce renard
L'amertume et Dieu sait si je l'ai pour ma part
Porté comme un enfant volé toute ma vie
Malgré la méchanceté des gens et les rires
Quand on trébuche et les monstrueuses raisons
Qu'on vous oppose pour vous faire une prison
De ce qu'on aime et de ce qu'on croit un martyre
Malgré les jours maudits qui sont des puits sans fond
Malgré ces nuits sans fin à regarder la haine
Malgré les ennemis les compagnons de chaînes
Mon Dieu mon Dieu qui ne savent pas ce qu'ils font
Malgré l'âge et lorsque soudain le cœur vous flanche
L'entourage prêt à tout croire à donner tort
Indifférent à cette chose qui vous mord
Simple histoire de prendre sur vous sa revanche
La cruauté générale et les saloperies
Qu'on vous jette on ne sait trop qui faisant école
Malgré ce qu'on a pensé souffert les idées folles
Sans pouvoir soulager d'une injure ou d'un cri
Cet enfer malgré tout cauchemars et blessures
Les séparations les deuils les camouflets
Et tout ce qu'on voulait pourtant ce qu'on voulait
De toute sa croyance imbécile à l'azur
Malgré tout je vous dis que cette vie fut telle
Qu'à qui voudra m'entendre à qui je parle ici
N'ayant plus sur la lèvre un seul mot que merci
Je dirai malgré tout que cette vie fut belle
.
Louis Aragon
.
J'ai tant caché mes différences
Sous des airs ou des faux semblants
J'ai cru que d'autres pas de danse
Me cacheraient aux yeux des gens
Je n'ai jamais suivi vos routes
J'ai voulu tracer mon chemin
Pour aller plus haut, aller plus haut
Où l'on oublie ses souvenirs
Aller plus haut, aller plus haut
Se rapprocher de l'avenir
J'ai perdu tant de fois la trace
Des rêves pour lesquels je vivais
Je n'ai pas su te dire je t'aime
Seulement te garder
Il faut aussi dire ses doutes
Et les poser dans d'autres mains
Pour aller plus haut, aller plus haut
Et dessiner des souvenirs
Aller plus haut, aller plus haut
Et croire encore à l'avenir
Pour aller plus haut, aller plus haut
Et dessiner des souvenirs
Aller plus haut, aller plus haut
Et croire encore à l'avenir
Aller plus haut, aller plus haut
Se rapprocher de l'avenir
Que restera-t-il de nous,
Quand le temps aura glissé sur nos vies,
Quand la terre aura recouvert nos corps
D'une poussière jaunie ?
Que restera-t-il de nous :
Une poignée de souvenirs ?
Un parfum, un sourire ?
Quelques mots, quelques gestes ?
Que restera-t-il de nous
Dans la brume du monde
Une idée, une colombe
Un rêve ou un empire ?
Je ne sais pas :
Tout passe si vite
Que sont tous les mythes
Quand la vie nous quitte ?
Mais le vent qui emporte tout
M'a soufflé l'autre jour
Sa réponse douce
Comme du velours
Il m'a dit : T'en fais pas
Tout ne disparaît pas
Le ciel garde pour toujours
Chaque empreinte d'amour
.
La Licorne
.