photo personnelle
Nous avons une raison de vivre :
apprendre, découvrir, être libres !
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Richard Bach
"Jonathan Livingston le goéland "
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photo personnelle
Nous avons une raison de vivre :
apprendre, découvrir, être libres !
.
Richard Bach
"Jonathan Livingston le goéland "
.
Homme
Tu as regardé la plus triste la plus morne de toutes les
fleurs de la terre
Et comme aux autres fleurs tu lui as donné un nom
Tu l'as appelée
Pensée.
Pensée
C'était comme on dit bien observé
Bien pensé
Et ces sales fleurs qui ne vivent ni se ne se fanent
jamais
Tu les as appelées immortelles...
C'était bien fait pour elles...
Mais le lilas tu l'as appelé lilas
Lilas c'était tout à fait ça
Lilas...
Lilas...
Aux marguerites tu as donné un nom de femme
Ou bien aux femmes tu as donné un nom de fleur
C'est pareil.
L'essentiel c'était que ce soit joli
Que ça fasse plaisir...
Enfin tu as donné les noms simples à toutes les fleurs
simples
Et la plus grande la plus belle
Celle qui pousse toute droite sur le fumier de la misère
Cette fleur tellement vivante
Toute jaune toute brillante
Celle que les savants appellent
Hélianthe
Toi tu l'as appelée soleil ...
Soleil...
Hélas ! hélas ! hélas et beaucoup de fois hélas !
Qui regarde le soleil hein?
Qui regarde le soleil ?
Personne ne regarde plus le soleil
Les hommes sont devenus ce qu'ils sont devenus
Des hommes intelligents...
Une fleur cancéreuse tubéreuse et méticuleuse à leur
boutonnière
Ils se promènent en regardant par terre
Et ils pensent au ciel
Ils pensent...
Ils pensent... ils n'arrêtent pas de penser...
Ils ne peuvent plus aimer les véritables fleurs vivantes
Ils aiment les fleurs fanées les fleurs séchées
Les immortelles et les pensées
Et ils marchent dans la boue des souvenirs dans la
boue des regrets...
Ils se traînent
A grand-peine
Dans les marécages du passé
Et ils traînent... ils traînent leurs chaînes
Et ils traînent les pieds au pas cadencé...
Ils avancent à grand-peine
Enlisés dans leurs champs-élysées
Et ils chantent à tue-tête la chanson mortuaire
Oui ils chantent
A tue-tête
La pensée...
Jacques Prévert
Dans l'âge mûr, on arrive naturellement à être moins superficiel,
mais en même temps il devient plus difficile d'être léger.
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Charles-Augustin Sainte-Beuve
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Regarde
Ce monde en fer
Ce monde en feu
Ce monde à l'envers
Ce monde de l'an vieux
Ce monde de science
Qu'on
Vénère sans conscience
Ce monde d'indécence
Qui piétine le sens
Ce monde qui se pave
De bonnes intentions
Ce monde d'épaves
De guerres, de tensions
Ce monde de fous
Ce monde qui s'en fout
Ce monde qui dort
Sur des monceaux d'or
Ce monde qui se vautre
Dans la contemplation
De soi, de soi, de soi
Ce monde sans autre
Et sans attention
Monde sans foi ni loi
Regarde
Regarde un peu
Ce monde d'enfer
Ce monde d'envieux
Que faut-il en faire ?
Moi, je rêvais mieux
Moi, je rêvais d'air,
De vie et de jeu
Moi, je voyais clair
Jusqu'au bout des cieux
Je voyais la lumière
Tout au fond des yeux
Et dans son mystère
La trace de Dieu
Regarde
Regarde un peu
Ce monde est immonde
Et c'est pour cela
Que nous changerons la ronde
Que nous donnerons le "la"
D'une vie plus profonde
D'une vie plus féconde
Ce monde est immonde
Oui, c'est comme ça
Ce monde est immonde
Et c'est pour cela
Que nous sommes là.
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La Licorne
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Un jour, ceux que nous aimons passent de l'autre côté des choses.
Ils quittent leur corps visible pour entrer dans l'invisible.
Les proches pleurent, mais, dans leur "jardin secret",
la relation aux morts reste vivante.
Comme si ces derniers étaient seulement passés
de l'autre côté d'un miroir.
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La tradition juive insiste sur le fait
que la présence au monde d'un disparu
reste solidement accrochée à nos vies grâce aux mots.
Ainsi en témoigne la magnifique prière des morts
qu'est le Kaddish, qui dit:
"Puisse son âme être tissée au fil de nos vies."
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Marie de Hennezel
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Un silence d'air, de lumière et de ciel.
Dans le silence transparent
la journée s'est reposée :
la transparence de l'espace
c'était la transparence du silence.
La lumière immobile du ciel s'est calmée.
La croissance des herbes.
Les insectes de la terre, parmi les pierres,
dans la même lumière, c'étaient des pierres.
Le temps dans la minute était rassasié.
Dans le calme absorbé
il a été consommé à midi.
Et un oiseau chantait, flèche fine.
La poitrine d'argent blessée faisait vibrer le ciel,
les feuilles ont bougé,
les herbes se sont réveillées...
Et j'ai senti que la mort était une flèche
on ne sait pas qui tire
et en un clin d'œil nous mourons.
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Octavio Paz